100 Bullets

Nous vous avions déjà parlé de « 100 Bullets » en janvier 2001, lors de la sortie aux éditions Soleil, des trois premiers épisodes sous le titre « A bout portant ». En France, la série en était restée là ; mais il n’en va pas de même aux USA ; où elle approche désormais du numéro 50. Le retour de « 100 Bullets » ce mois-ci dans la collection Semic Book, est pour nous l’occasion de revenir plus en profondeur sur cette série.

Thierry Mornet, le rédacteur en chef des éditions Semic, nous confiait en juin dernier, à l’occasion d’une interview au salon BD Expo, que le retour de « 100 Bullets » ne s’est pas fait sans interrogations, tant sur la forme, que sur le titre à employer. C’est dans un Semic Book reprenant les cinq premiers épisodes que « 100 Bullets » fait son retour en conservant cette fois-ci son titre américain. Le titre choisi à l’époque par Soleil était trop éloigné de l’idée originale et ne permettait pas d’identifier la série. D’un autre coté, il était impossible de traduire ça littéralement par « Cent balles » pour des raisons évidentes. Après avoir envisagé d’appeler la série « Cent Bastos », Semic a finalement décidé de garder le titre américain « 100 Bullets ».

Pour la forme, le choix s’avérait tout aussi difficile. En ne publiant qu’un seul arc, Soleil donnait l’impression que la série tournait autour de Dizzy Cordova, ce qui n’est pas le cas. De plus le grand format cartonné n’était pas forcement le plus adapté ; non seulement pour les lecteurs de comics, mais aussi pour les lecteurs de BD franco-belge. Eduardo Risso est déjà un dessinateur connu en France, grâce à ses collaborations avec le scénariste Carlos Trillo. Cet argentin a d’ailleurs débuté sa carrière internationale dans notre pays, avec la série « fulu », et plus récemment avec « je suis un vampire » ou « lectures macabres ». Ces deux dernières séries étant éditées par Albin Michel en album souple & en Noir & Blanc, « 100 Bullets » a donc aussi était envisagé pour rejoindre la collection Semic Noir.

« 100 Bullets » ce sont en fait deux séries en une. C’est d’abord une série anthologique basé sur un concept simple. Un homme, l’agent Graves se présente à des personnes d’horizon divers. Toute ces personnes ont un point commun : leur vie à basculée de manière tragique, suite a un événement dont les causes restent mystérieuses. Graves leur offre la vengeance et l’immunité dans une valise. Celle ci contient une arme et cents balles intraçables. Elle renferme aussi une enveloppe contenant la vérité, toutes les preuves de ce qui c’est passé et la photo du responsable… Et là… et bien là tout le monde suis sa voie. Chacun se retrouve face à ses démons & sa conscience et bien souvent face au risque de reproduire ce dont il a été victime.

Ce premier tome vous permettra de découvrir deux histoires très différentes. Deux destins détruits que le fameux attaché-case va relancer de manières différentes. Bien que les deux héros de cet album ne le sachent pas, ils viennent de mettre les pieds dans quelque chose qui dépasse largement leur affaire. Le lecteur lui aussi se sent largement dépassé par tout cela, c’est un élément voulu par le scénariste Brian Azzarello. « 100 Bullets » s’inscrit dans un schéma bien plus grand que celui de ces arcs autosuffisants. Celui-ci se construit à coup d’indice & de non-dits. Si à la fin du Semic Book vous avez l’impression de n’avoir rencontrer qu’un acteur de ce grand complot : c’est que vous en avez raté deux autres… Le plus souvent, ce n’est ainsi qu’après coup que lecteurs & personnages comprennent les tenants & aboutissants de toutes ces affaires.

La force de cette seconde série autour de la série, est de ne pas vraiment dire son nom. Azzarello fait toujours référence à des événements sans les expliciter et tout reste à interpréter. On sait qu’il existe « le Trust », une organisation secrète dont l’influence semble illimitée. Graves est le chef des Minutemen le bras armé de celui-ci. Sa distribution de mallettes surprises semble échapper aux desseins du Trust. Pourtant celles-ci permettent aussi à Graves de tester ceux qui deviendront peut-être les prochains Minutemen. Au fur et à mesure des épisodes, tout cela s’éclaircie et s’obscurcie à la fois. Les questions se multipliant au rythme des indices. De nouveaux personnages apparaissent et l’on découvre tout ce que les Minutemen & le Trust ont pu faire par le passé. Je vous recommande à ce titre le N°27 entièrement disponible en consultation sur le mini-site « 100 Bullets » ; où l’on découvre Comment Graves & ses attachés-cases ont causé la mort de JFK.

100 Bullets a reprit dans le cœur des fans de Vertigo la place de série phare tenue jadis par Sandman puis Preacher et ce n’est pas usurpé. Il s’agit d’une série intelligente, bien écrite, pleine de rebondissement et de surprises. Au fur & à mesure de la série l’intrigue générale devient de plus en plus passionnante et chacun peaufine son interprétation personnelle. Si vous en voulez plus, je ne saurais trop vous conseil la lecture de l’article fait dans Scarce 60 et le site personnel d’Eduardo Risso.La spécificité de la construction de « 100 Bullets » fait que chaque interprétation extérieure permet de parfaire la sienne.

Posted on septembre 20, 2003 at 21:14 by Tony LETROUVÉ · Permalink
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